Au Moyen-Orient, il y a presque dix siècles, à l'époque des croisades, la quête d'une coupe sacrée qui détiendrait tous les secrets de l'univers, soit la version iranienne du graal chrétien.
« En derviche tu es vêtue, aussi est-ce en derviche que tu dois avancer. Un derviche n'a rien à lui et ne tend pas la main : il attend de trouver sous ses pas ce qui l'aide à vivre. Un derviche est fol aux yeux des hommes : tu devras jouer les imbéciles, muette obstinément, langue perdue ou inintelligible, pas une parole ne devra sortir de toi. Car mentir, c'est sortir de son chemin, et révéler son secret, c'est aussi s'en écarter. Ni mensonge, ni dévoilement. Quoi que tu voies, quelles que soient tes rencontres, ne te fais pas connaître, ne parle jamais, reste dissimulée. Tu seras invisible aux Noirs et à tous ceux qui te recherchent, amis comme ennemis ; ainsi, tu avanceras sous la protection du Pôle. Si tu en sors, même Lui ne pourra t'aider. » Sibylle a la Rose de Djam mais les épreuves ne font que commencer. Elle doit retourner vers les siens et rapporter la coupe aux Quarante, en échap- pant aux Noirs qui vont la traquer dans tout le Kur- distan et l'Azerbaïdjan. Pour leur échapper, le Pôle du Monde lui fournit une panoplie de derviche qui lui garantit de pouvoir échapper à la vision du roi-serpent et donc des Noirs, selon certaines conditions : jouer les fol en Dieu muet et l'esprit égaré. Ainsi, elle se lance sur les routes d'Iran, mé- connaissable mais échappant aussi à la vision des Quarante, qui ignorent absolument ce qu'elle est devenue et ne peuvent l'aider.
Un soir, dans un caravansérail, un musicien lui dérobe la coupe par jeu, y verse du vin et boit de- dans. Son esprit explose aussitôt sous la somme des secrets du monde qu'il vient d'avaler d'un coup.
Pour reprendre la coupe, Sibylle cesse de feindre la folie, parle et envoie donc promener les règles et la protection du Pôle. À partir de là, les vrais ennuis commencent.
Née en 1965, Sandrine Alexie a étudié l'art de l'islam à l'École du Louvre, ainsi que la langue et la culture kurdes à l'Institut national des langues
et civilisations orientales. Elle est l'auteur d'un roman, Kawa le kurde (2005, L'Harmattan), et a traduit deux ouvrages de littérature classique kurde, Mem et Zin, d'Ahmedê Khani (2001, L'Harmattan) et Us et
coutumes des Kurdes, de Mahmoud Bayazidi (2015, Geuthner-L'Asiathèque). Sandrine Alexie habite à Paris.